Éclats de lune gris souris
- Selene De Beaumont
- il y a 3 heures
- 3 min de lecture
Éclats de lune gris souris
Aujourd’hui, je dépose ici un éclat particulier. Un éclat gris souris.
Il ne fait pas partie des recueils en soumission chez les éditeurs, c’est un texte qui est venu comme un souffle de fin.
Je ne sais pas s’il restera. Mais il devait exister.
C’est peut-être ça, aussi, écrire : parfois, semer une dernière phrase là où plus rien ne pousse.

Éclats de lune gris souris
Ils ne sourient pas, pourtant, ces éclats.
Ils sont mats et ternes.
Résidus d’un espoir parti en catimini,
qui m’a laissée là,
sur le trottoir vide,
apeurée.
Les mots se sont enfuis.
Il les a usés.
Entre mes lèvres,
qui espéraient encore rencontrer les siennes.
Au creux de mes doigts,
qui rêvaient encore de frôler les siens.
Les mots se sont tus.
Il m'a laissé muette,
les joues froides,
le dos courbé, mais debout,
suffisamment pour voir,
la route que je devrai emprunter seule.
Les mots se sont perdus.
Dans mes draps désertés,
dans mes soupirs étouffés,
dans les nuits trop longues.
Trop blessés pour revenir,
Trop fragiles pour renaître seuls.
Les mots se sont brisés.
Contre la hauteur des murs que l'on ne comprend pas,
Contre le venin de l'absence,
Ils se sont retournés contre moi,
Mais c'est à moi qu'ils manquent, dissous dans l'éclat des lunes
Que je n'écrirai plus.
Je ne peux pas le tirer par le bras.
Je ne peux pas voler son cœur.
Je ne peux pas habiter ses pensées malgré lui.
Je ne peux pas tapisser son âme
de mes plus beaux sentiments.
Je suis restée,
sur le seuil glacé des marches de notre amour.
Je suis restée,
malgré le froid de son mépris,
le vent tranchant de son silence,
la brûlure des souvenirs au cœur,
la tempête furieuse de mes sentiments.
Je suis restée,
comme une lanterne invincible,
comme un rayon après les matins gris,
comme une trace de pas
laissée pour qu’on me retrouve.
Mais je suis surtout restée seule.
Seule à aimer.
Seule à rêver.
Seule à vouloir le comprendre.
Seule à le choisir parmi des milliers.
Et maintenant...
Je contemple le champ de ruines.
J’ai bâti une partie de ma propre désolation.
Lui…S'est détourné léger de l'adieu.
Pas même un regard par-dessus l’épaule des matins doux.
Juste son absence,
solide comme un mur qu’on ne traverse pas.
Et moi,
j'ai gratté encore, de toutes mes forces,
avec mes ongles,
mes mots,
mes poèmes,
mon amour,
le béton des promesses suspendues,
dans l’espoir qu’un jour, quelque chose cède.
Mais aujourd’hui…
L’espoir est mort.
Sous son regard détourné, pour toujours.
L’espoir est mort,
et cela ne me ressemble pas.
L’espoir est mort,
et ce n’est pas moi qui l’ai tué, celui-là.
L’espoir est mort
sous les gifles du temps,
sous la griffe de l'indifférence.
Et aujourd’hui,
c’est un jour gris souris.
Un jour sans contours,
sans cri.
Un jour qui dit :
J’ai semé.
Semé au vent des regrets,
des pardons,
des souvenirs,
des rêves d’avenir.
J’ai semé au vent
la magie que j’avais dans le cœur pour lui.
J’ai semé au vent
en pensant qu'il aimait mon jardin.
J’ai semé des tournesols,
des coquelicots,
des éclats de toutes les lunes d'un cœur, le mien,
Qui n'a jamais été plus vivant, plus vibrant, plus entier,
Pour personne, pas même pour lui-même.
J’ai semé au vent
mon amour comme une offrande.
Et finalement,
malgré toutes les graines,
malgré mon travail acharné,
malgré le soleil
que j'ai tenté d'étirer jusqu’à ses fenêtres,
Je peux dire une chose : je n’ai pas la main verte.
Je n’ai récolté
qu’un ciel gris souris.
Selene
Éclat post-scriptum
Je ne savais pas si j’allais le publier.
Je ne voulais pas donner l’impression de sombrer, ni prétendre que je gardais espoir.
Mais Gris souris fait partie de moi. Il fallait que je le dépose ici, comme une vérité nue au milieu du reste.
Et puis ce matin, j’ai reçu une réponse à l’un de mes envois. Ce n’est peut-être pas encore l’éditeur définitif, mais leurs mots m’ont touchée.
Ils ont dit que ma plume était "sensible, sensuelle et libre", que Éclats de Lune était "un voyage intérieur intensément vibrant".
Alors non, je ne vais pas mentir : le cœur est encore lourd.
Mais lire ça m’a fait du bien. Un peu. Comme une petite étoile sur un ciel gris souris.
Les Lunes d’un Cœur continuent d’éclore. Même dans le froid.
Et peut-être que les mots, eux, ne sont pas morts.

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