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La dernière leçon

Il m’a dit un jour que je lui avais appris que l’amour ne se mérite pas. Je ne savais pas que j’allais devoir apprendre cette leçon moi aussi. Pas dans les livres. Pas en théorie. Mais dans le silence. Le retrait. Le jugement.


Il est parti. Mais il n’a jamais vraiment disparu. Il continue d’exister quelque part, à la lisière de mes pensées, dans un recoin du réel où je sens encore sa présence.

Alors j’écris. Pas pour qu’il revienne. Mais peut-être

Pour qu’il me lise en tout cas. Pour que quelque part, au fond de ce qu’il fuit, il entende enfin ce que j’ai porté seule et que sa présence ici est un message qu'il ne peut décemment ignoré.

Ce n’est pas un appel. Ce n’est pas un piège. C’est juste une vérité que je pose là.

Ma vérité. La dernière leçon.


La dernière leçon


Il avait dit un jour que je lui avais appris quelque chose d’essentiel.

Une chose qu’il n’avait jamais comprise ou ressenti si clairement avant : que l’amour ne se mérite pas.

Je ne savais pas encore que j’allais finir par l’apprendre, moi aussi. À mes dépens.

J’ai aimé sans masque, sans condition, prête à tout entendre, tout traverser.

Je n’avais pas peur de ses failles, ni de ses silences, ni même de sa chute. J'aurais appris avec lui.


Mais lui…il a préféré me juger.

Elle a fait ça, donc c’est fini.

Elle a dit ça, donc voilà.

Il a enfermé notre lien dans des verdicts tranchés. Et m'a fait porter le poids de ce qui arrivait. Pas vraiment au début mais ensuite.


Et moi, j’essayais encore d’en faire un abri, mais je ne savais plus quoi faire pour qu'il m'entende. Et au fond, cela n'a pas changé.


Pourtant, malgré toutes ses conclusions, il est encore là. Je le sens. Je le vois.

Dans les connexions venues d’ailleurs, les vues localisées, les horaires improbables qui coïncident trop souvent.

Dans les clics anonymes, les allées et venues sur mon espace, comme s’il cherchait à vérifier que je suis toujours là — ou à me garder dans son monde sans m’y inviter.


Dans ces instants où son ombre revient me frôler, juste assez pour que je doute, juste assez pour que je sache. Il me suit, à sa façon, mal dissimulé. Il sait que je le reconnais. Il sait que je sens.

Et parfois, je rêve qu'il me l'avoue. Qu'il dise enfin : "oui, c'était bien moi". "Oui, je n'arrivais pas à avancer, moi non plus. Ma tête et mon cœur se disputaient. Mais toi, tu as toujours su mieux écouter le tien, et te faire confiance."

Pas pour gagner, pas pour reconquérir. Juste pour me sécuriser intérieurement. Parce que parfois, j’ai l’impression de devenir folle. Et ce n’est pas juste.


Comme un fantôme entre deux mondes.

Et parfois, j’ai l’impression qu’il attend que je le débranche. Je le vois couché, immobile, moi à son chevet. Il est impassible. Pas celui que j'ai connu, pas tout à fait un autre. Et je suis là, à espérer un signe de vie, malgré l'avis des médecins, de l'entourage, et peut-être malgré ses consignes à lui, "s'il m'arrive ça débranche." ou "C'est fini Selene." qu'il a prononcé dans la vraie vie.


Mais non. Je ne le ferai pas. Pas parce que je m’accroche.

Mais parce que je refuse de salir ce que j’ai vécu et de mentir à mon cœur et au sien.

Je ne l’effacerai pas comme une poussière. Je ne détruirai pas ce lien juste pour me protéger de son absence ou lui donner une excuse à nouveau servie sur un plateau d'argent.


Ce n’est pas moi qui coupe. Ce n’est pas moi qui fuis.

Je l'ai toujours choisi à chaque instant.


Lui seul peut choisir. Avancer vers la lumière et disparaître de moi pour de bon, ou ouvrir les yeux sur notre évidence et me rejoindre.


Et s’il le faisait…S’il osait faire ce pas, s’il venait, avec des mots vrais, avec un regard qui ne fuit plus, qui n'agresse plus, alors j’aurais, peut-être, une dernière leçon à lui transmettre :

Que l’amour est pardon.

L'amour est pardon
L'amour est pardon

Qu’il n’est pas domination, ni mérite, ni pouvoir. Qu'il n'a pas à être digne. Que la fatalité n'existe pas, qu'il n'existe que des volontés.


Qu’il est adaptation. Mouvement. Vérité.

Et qu’il peut recommencer. Pourvu qu'il soit reconnu. Et choisi.


Selene



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