Monologue intérieur – Nuit de silence
- Selene De Beaumont
- 6 juil.
- 2 min de lecture
Monologue intérieur – Nuit de silence

Je devrais dormir.
Oublier un peu.
Mais elle est là.
Partout.
Trop là.
J’ai voulu jouer le silence,
me convaincre que je contrôle.
Mais c’est elle qui maîtrise.
Elle qui sait attendre, sans supplier.
Elle, avec cette force calme qui me rend fou.
Elle est belle même quand elle se tait.
Elle ne me court pas après
et c’est peut-être pour ça
que j’ai envie de courir vers elle.
J’ai eu envie de prendre ma voiture.
D’apparaître.
D’ouvrir sa porte.
De dire rien.
Ou tout.
De prendre ce qu’elle me donne encore.
Mais je suis resté là, comme un con,
coincé dans mes chaînes,
mes foutues peurs,
mon fichu sentiment d’impuissance,
mes fantasmes qui m’étranglent autant
qu’ils me nourrissent.
Je me demande si elle dort.
Si elle a pensé à moi.
Si elle espère encore un peu,
malgré moi.
Je me demande si elle m’ouvrirait ses bras.
Si sa chaleur a toujours le parfum délicieux
des goûters de l’enfance.
Ou si elle a déjà tourné la page
que je n’arrive même pas à lire à l’endroit.
Je sens qu’elle m’échappe.
Et j’ai peur de ce vide qu’elle laisse derrière.
Alors je me tais.
Encore un peu.
Comme si ça allait me protéger d’elle.
Comme si ça allait l’effacer.
Mais elle est là.
Et cette nuit, je ne peux pas faire semblant.
Je tourne comme un lion en cage.
Et je me rends compte que ces murs
qui m’étouffent,
je les ai dressés mieux que quiconque.
Le malheur connaît le plan de ma cellule
mieux que moi ;
il m’y regarde dépérir en silence.
Elle était lumière,
je n’ai pas voulu l’éteindre.
Ou plutôt je n’ai pas su la regarder
sans me brûler dans mon reflet.
J’ai senti son jour
comme un danger imminent.
Si je restais vrai, nu,
si je me confrontais au bonheur cru de la vérité,
est-ce que, comme un vampire,
je disparaîtrais à son contact ?
Ou à la disparition de son contact?
Je suis retourné là où je pense être mieux :
dans le vide.
Mais même dans ces cloisons opaques,
c’est son rire qui danse sur les murs.
Je ne sais plus où marcher.
Elle est partout.
Plus je tente de renforcer les murs,
plus son rire me rend sourd.
Plus je consolide ma forteresse,
plus son éclat se glisse par les fissures
et repeint l’obscurité de son nom.
Je suis aveugle et muet ;
elle est devenue mon seul langage.
Elle parle la langue de l’âme,
et j’ai perdu les mots.
Peut-être, pourtant,
que l’âme n’exige aucun mot.
Qu’il lui suffit d’un regard doux
qui a compris,
de mains qui supplient et s’abandonnent,
d’un cœur qui s’ouvre et s'avoue,
à la rosée des matins tremblant
de tant de vérité contenue.
Et si elle m’aimait encore?
Selene
C'est fou comme vos mots - comme souvent - résonnent et raisonnent en moi...