Il me dévorait avec l'inquiétude d'un enfant qui sait que sa glace va fondre
- Selene De Beaumont
- 30 janv.
- 1 min de lecture

Il y avait ces moments, précieux et éphémères, où Roland passait son temps suspendu à mes lèvres, délicatement, comme s'il cherchait à y puiser quelque chose. Une faim, une soif, une fin annoncée. Il fallait faire vite, comme si le temps lui échappait, comme s'il devait respirer dans ce souffle partagé, se nourrir de ma présence, pour oublier, un instant, les démons, les peurs, les angoisses qu'il portait en silence et que, parfois, je lisais dans ses yeux bleus qui se teintaient alors de gris.
Je savais qu'il se battait, que son mal-être se cachait sous mille couches de douceur. Parfois, je me surprenais à m'agacer de cette insistance, de ces bécots en cascade, de cette lancinante pression qui me frôlait sans relâche. Mais aujourd'hui, je réalise combien tout cela me manque. J'ai cette envie de ne plus avoir d'espace pour respirer, comme si, sans lui, je ne respirais plus du tout.
C’est sa présence qui faisait que je me sentais plus vivante que jamais. C'est sans lui que mon souffle se perd, que le vent de ma vie semble se dissiper. Peut-être qu'il n'a jamais su à quel point il était mon oxygène, mon air. Surtout à cette période charnière pour moi. Peut-être qu'il l'a compris, dans le fond, mais n'a jamais eu le courage de le dire. Peut-être même qu'il était terrifié à l'idée de ne pas être à la hauteur.
Et moi, j'ai appris que l'amour, parfois, est fait de silences aussi lourds que des mots hurlés.
Aujourd'hui, je respire autrement, mais il me manque dans chaque souffle et mes lèvres, à jamais, appellent les siennes.
Selene
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