Lettre à Roland, l’instant où l’on cesse d’attendre
- Selene De Beaumont
- 30 mars
- 3 min de lecture
L’instant où l’on cesse d’attendre
J’ai compté les nuits. Toutes les nuits.
J’ai sombré chaque soir très tard, en réalisant qu’un jour de plus tu ne viendrais pas.
J’ai voulu me convaincre d’arrêter d’espérer, mais toujours une lueur subsistait : et si demain ? Et si un mot de moi, une image, un souvenir, un article de blog, un hasard, une visite te faisaient comprendre ?
J’ai tout fait.
Je t’ai appelé, écrit des lettres, des mails, envoyé des messages, tendu la main encore et encore.
Je suis venue à toi, brisant mon orgueil tout à fait car je pense que l’ego n’a rien à faire là -dedans, effaçant ma douleur pour t’aimer malgré tout.
Chaque geste était une supplique, un cri silencieux pour capter ton regard, pour espérer ne serait-ce qu’une réponse. J’ai encaissé chaque rejet, chaque coup porté à mon cœur, en te pardonnant sans cesse, convaincue que notre amour pouvait renaître malgré tout.
Mais j’ai fini par comprendre : je vivais cet amour seule.
J’ai regardé le portillon de mon jardin, celui que tu connaissais si bien. Tu trouvais toujours une excuse très mignonne pour que je t’y raccompagne, pour grappiller quelques secondes de plus avec moi. T’en souviens-tu ?
Et j’ai compris que je pouvais le surveiller autant que je le voulais : tu avais décidé de ne plus jamais le franchir.
Alors, je choisis de souffrir une bonne fois et d’en finir avec cette attente qui me ronge depuis bientôt 8 mois. Te rends-tu compte?
Je ne veux plus de ce monde sans couleur où je ne suis plus qu’une passagère. Je veux redevenir celle que j’étais : l’aventurière, celle qui expérimente, qui crée, qui avance.
J’ai des projets. Des road trips seule, malheureusement. Des réflexions sur ma carrière, sur l’évolution de mon blog, sur ma formation en sexothérapie, sur mon rôle dans la domination. J’envisageais un tournant, que ce rôle soit partagé, un compte de couple et tant d’autres choses. J’ai tout à réinventer seule alors que je voulais t’intégrer si fort. Alors que je voulais ta force avec moi, ton regard pour me donner envie de me dépasser.
Je recentre ma vie sur ce qui compte : ma fille, mon avenir, mes rêves à retrouver.
Mais surtout, j’ai pris conscience d’une chose essentielle : l’amour infini et précieux que j’ai en moi.
Cet amour que je suis prête à partager, à multiplier et à offrir, mais jamais à sacrifier.
Je ne renoncerai jamais à l’authenticité, ni au bonheur de grandir à deux, ni à la communication, ni à l’engagement.
Toi, tu as fait ton choix. Et il n’est pas pour nous.
Je t’ai rendu l’hommage que je m’étais promis.
Je t’ai demandé pardon en face, par écrit, dans mille lettres que je n’ai pas envoyées et dans mille pensées et nuits. J’aurais aimé te prouver mon honnêteté, que tu l’éprouves mais tu ne le veux pas.
Mon cœur a toujours été sincère et ma réflexion sur moi-même véritable.
Tu as préféré le silence. Tu as préféré partir.
Je n’ai rien à regretter, j’aurais tout fait, tout donné pour nous.
Mais ce n’est pas une histoire qui s’écrit seule.
Alors surtout, n’utilise pas ce texte pour valider une rupture que je n’ai jamais voulue et que toi seul as actée.
C’est un mot de survie.
C’est le choix de vivre, plutôt que de mourir chaque jour un peu plus dans cette attente, dans l’espoir d’un regard chéri, qui se détourne de moi.
Pas de jeu de dupes.
C’est ton choix.
Et ce que tu as voulu.
Mon cœur, malgré la douleur et les regrets, conserve la sincérité de ses élans.
Mais je refuse que ce silence imposé continue de dicter ma vie.
Je suis en train de me perdre dans cet amour unilatéral, et tu n’en as que faire.
Selene
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