Quand l’absence devient une énigme
- Selene De Beaumont
- 8 mars
- 4 min de lecture
Quand l’absence devient une énigme
1. Une douleur invisible mais bien réelle
Il est des blessures invisibles qui marquent plus profondément que celles que l'on peut voir. On parle souvent des deuils, des séparations, de la difficulté de tourner la page. Mais qu'en est-il lorsque l'on ne sait pas si une page se tourne ou si elle reste simplement en suspens, flottant entre ce qui fut et ce qui aurait pu être ? Quand l'absence est une énigme plus qu'un adieu ?
Vivre avec une douleur qui ne s’explique pas rationnellement, c’est porter un poids que personne ne semble voir. Le monde continue de tourner, les jours s’enchaînent, et pourtant, à l’intérieur, quelque chose reste figé. Cette sensation que l’autre, quelque part, existe encore dans une forme de lien indéfinissable, mais inaccessible. Une présence diffuse, un murmure persistant. Est-ce une illusion ? Un refus de lâcher prise ? Ou certaines connexions sont-elles simplement plus fortes que le silence ?
2. La violence du silence
Un déséquilibre qui semble m'écraser : je ressens tout, une tempête m’habite, et en face, c’est le néant. Comme si ma douleur était invisible, comme si mon existence pouvait être effacée sans conséquence.
Chaque tirage de tarot, chaque objet chargé de souvenirs, chaque nuit passée à pleurer, à écrire des lettres envoyées, non envoyées et sans écho. Les trajets jusqu’à chez lui, l’attente, le rejet. L’indifférence à ma souffrance. Les moments de panique où j’aurais voulu l’appeler, où j’avais besoin qu’il me soutienne. Être tout un jour, plus rien le lendemain. Tomber de mille étages sans parachute et devoir malgré tout continuer à marcher avec le corps en miettes.
Dis, elles étaient là, les miettes d'infini?
Et c’est ça, la violence : il y a eu quelque chose. Et puis plus rien. Comme si ce qui était brûlant pouvait s’éteindre sans laisser de cendres. Comme si l’autre pouvait exister pleinement un jour et disparaître le lendemain, sans laisser derrière lui l’écho de ce qu’il a été.
3. La quête de sens interminable
Ne pas réussir à dire que c’est fini. A personne, et surtout pas à soi. Détester les commentaires de ceux qui parlent de tourner la page, ceux qui promettent un avenir amoureux nouveau et flamboyant, ceux qui expliquent comment ressentir, comment aimer, qui disent ce qu'il aurait fallu faire, ce qu'il est décent de faire dans pareille situation mais attention pour mon bien. Se retrouver seule parce qu’on ne supporte plus de faire semblant.
Et si mon bien était mort lui-aussi?
"Il n’est plus dedans", ça veut dire quoi ? "Il s’est trompé", mais encore ? Quand il a dit "je t’aime" ? Quand il a dit que j’étais la personne la plus importante de sa vie ? C'est là l'erreur? Ou c'est l'erreur de penser assumer un couple avec moi? Penser être avec moi tout court?
Je n’étais rien, en fait ? Un jeu ? Un piège ?
"Quand tu m’aimeras comme une folle, le jeu, c’est que je disparais" ?
Il y a eu un amour intense, un feu qui a tout consumé, et puis, lui, il a fermé la porte. Brutalement. Sans mots clairs, sans m’accorder une conclusion, sans prendre le soin de venir parler avec moi. Et c’est ça qui torture. Pas seulement la perte, mais l’absence de sens.
Comment passe-t-on de "je t’aime" à "je te rejette" ? Comment peut-on dire "tu es la personne la plus importante de ma vie" et ensuite traiter cette personne comme une étrangère, pire, comme une menace ? Comment peut-on aimer une présence constante et, une fois obtenue, la fuir comme si elle brûlait ?
4. La vérité qu’il refuse d’affronter
La vérité, c’est que ce n’est pas moi qui suis incohérente. C’est lui. Je cherche encore la vérité, mais lui, il l’a déjà fuie. Parce qu’il n’a pas la force d’affronter ce qu’il a détruit, ou parce qu’il ne veut pas se voir comme celui qui fait du mal (aussi).
Ce que je ressens aujourd'hui est la preuve que ça a compté. Peut-être qu’il fuit cette intensité, ou qu’il se convainc qu’il n’a pas à la regarder en face. Peut-être qu’il pense qu’il ne peut rien faire, ou qu’il ne veut rien faire. Mais moi, je reste avec cette tempête dans le cœur, avec ce vide qui hurle.
5. Et maintenant ?
Et pourtant, malgré tout, je marche. Chaque jour, j'avance. Même quand tout semble figé, même quand mon esprit supplie qu’on le laisse tomber. Même quand la culpabilité me dévore d'être encore dans cet état après ce temps, d'être une ombre auprès des autres, auprès de ceux qui comptent pourtant.
Alors, maintenant, il faut réapprendre à exister autrement. Pas pour oublier, pas pour minimiser ce qui a été, mais pour se redonner une chance.
Écrire une lettre à soi-même pour dans dix ans, y déposer ses rêves, ses espoirs.
S’autoriser à se pardonner ce que l'on aurait pu faire autrement, à lâcher prise.
Inventer de nouveaux rituels, bâtir des repères qui ne dépendent que de nous.
Trouver de la douceur dans des gestes simples, reconstruire patiemment ce qui a été brisé.
Je ne suis pas thérapeute, je ne prétends pas avoir de réponses universelles. Mais je peux offrir une autre voix, une autre façon d’aborder la douleur. Parce que je la traverse. Parce que je sais ce que c’est. Parce que, peut-être, en partageant ces fragments d’humanité, on peut ensemble trouver une façon de continuer.
Jusqu’à ce que, un jour, sans s’en rendre compte, on cesse de compter les jours, les mois et j'espère pas les années. Jusqu’à ce qu’on oublie, peut-être, d’y penser.
Ecrivez-moi.
Selene
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